L'HISTOIRE D'UNE MAIRE QUI DILAPIDE DES BIENS QUI NE LUI APPARTIENNENT PAS

C'est à chaque fois la même histoire recommencée.

Le film se répète inlassablement.

Un bâtiment à usage public qui appartient à la ville. Un bâtiment parfois à fort intérêt patrimonial et historique. Puis l'inexplicable volonté d'un maire d'appauvrir sa ville d'un outil, d'une patrimoine, d'une valeur.

Depuis l'arrivée de madame Arosteguy en 2020, pas moins de quatre sites - Villa Sion (600m2 + terrain de 8.000m2), Auberge de Jeunesse (plus de 2.000m2 + terrain de 6.500m2), Villa Fal (1.300m2 + terrain de plus de deux hectares) et locaux de la police municipale (460m2) - auront été cédés, à vil prix, avec une célérité qui interroge.

L'on peut aussi, d'une certaine manière, parler de «vente» dans le cas du cinéma Le Royal, pour lequel la maire a instauré un bail emphytéotique de 45 ans ! Quand, sur plusieurs décennies, une ville est dessaisie de la destinée d'un site tel que celui-ci, l'on peut presque acter la cession.

Dans cette frénésie de boutiquier est aussi prévue la vente des locaux du CCAS dont le bâtiment se trouve pourtant au square d'Ixelles, dans un «carré administratif» qui offre l'intérêt, pour le citoyen Biarrot, de concentrer un ensemble de services : mairie, Police Nationale, Police Municipale, Office de tourisme et billetterie de spectacles, Centre Communal d'Action Sociale, service municipal au logement social, Bureau des bus Txik Txak, etc...

Notons à nouveau le retrait honteux, par la maire, du local historique (+ de 45 ans !) de l'association 3A des personnes seniors, dans cet emplacement central de la ville.

Ne faisant jamais secret sa volonté de vendre l'Hôtel du Palais, madame Arosteguy feint d'ignorer que la vente des murs du Palais à une société hôtelière, laisserait champ libre à celle-ci, quand elle le jugera opportun, de revendre à la découpe, en appartements privés, ce joyau historique : comme cela a été le cas pour presque tous les autres hôtels de prestige de notre ville.

Et puis voilà peu, la nouvelle est jetée et nous sidère : la Villa Natacha fait aussi partie du plan totalitaire des ventes.

Dans un petit hebdomadaire local - support au service d'une coterie locale -, l'intervieweur joue - à son habitude - au monsieur Loyal avec l'adjoint aux Finances Chazouilleres et lui demande : «(...) est-il toujours raisonnable aujourd'hui de conserver ces biens dans le patrimoine municipal ? (NDLR : Hôtel du Palais, golfs, villas, etc...) ? Ou faut-il envisager qu'il ne relève peut-être plus du rôle de la ville de posséder un tel foncier ?».

Dans ce petit jeu où l'intervieweur et l’interviewé connaissent à l'avance les questions et les réponses, l'adjoint biarrot déclare : «Je pense qu’il faut différencier les types de propriétés. Certaines, comme la Villa Banuelos, qui héberge des associations privées, sont dans un état délicat, non seulement en termes de structure, mais aussi de fonctionnement. Dans d’autres, comme à la Villa Natacha, nous hébergeons des services dédiés au sport et à la culture, mais ces locaux ne sont pas totalement adaptés. Une villa n’est pas toujours conçue pour accueillir des bureaux ou des services municipaux. De plus, ces bâtiments, au caractère patrimonial exceptionnel, nécessitent des rénovations très coûteuses. Cela nous amène à nous interroger : est-il pertinent de maintenir des services municipaux dans des villas ? Ou faut-il envisager, comme pour la Villa Fal, de les confier à des projets privés ? Dans ce cas, un investisseur privé, avec un projet encadré et sécurisé, pourrait assurer l’entretien et la préservation de ces lieux. Dans certains cas, s’obstiner à conserver ce patrimoine uniquement dans le domaine public sans moyens suffisants, c’est prendre le risque qu’il finisse par disparaître. Personnellement, je préfère voir un bon projet privé sauvegarder le patrimoine biarrot, plutôt que de le laisser se dégrader faute de moyens publics.».

Puis dans un article du quotidien Sud-Ouest du 17 janvier 2025 consacré à sa personne, madame Arosteguy nous distille cette information : «(...) l'autre partie de ce bâtiment - comprendre la résidence «Maider» rue Jean-Jaurès - sera occupée par les bureaux des divers festivals qui sont hébergés à la Villa Natacha.»...

Voyez-vous les travaux d'approche pour faire admettre aux Biarrots que d'un côté entretenir un bien patrimonial comme la Villa Natacha coûte cher, et que de l'autre côté que ceux qui occupaient en partie ladite villa ont déjà été déplacés ailleurs ?

Mais quel scandale ! Allons-nous laisser faire ? Allez-vous laisser faire ? Pour répondre à ces questions, il ne serait pas inutile que nous faisions un brin d'histoire sur ce lieu exceptionnel :

L'histoire entre la Villa Natacha et la Ville de Biarritz démarre en 1978.

Mais sa naissance date de 1905, quand l'agent de change suisse Albert-Guillaume Leuba décide de bâtir une villa. C'est décidé, ce sera à Biarritz : il trouve - rue d'Espagne - une parcelle de plus de 12.000 m2 sur laquelle se dresse une villa dénommée «Louis» qu'il s'empresse de raser pour donner libre cours à son projet.

Monsieur Leuba jette son dévolu sur les architectes parisiens Charles Sarazin (1873-1950) et Henri Sauvage (1873-1932) dont les réalisations novatrices font grand bruit.

Ces architectes auront aussi la paternité de la regrettée «Villa Océana», située sur l'avenue de l'Impératrice, où le docteur Jacques Poliakoff et sa famille vécurent. Après des années d'un invraisemblable délaissement, cette villa sera détruite en 1975. Ce sera le triste sort réservé à bien des fleurons d'architecture remarquable dans notre ville : voilà qui nous engage aujourd'hui, nous, les Biarrots, à être vigilants.

Revenons à la Villa Natacha :

La combinaison architecture régionale et style villa «bord de mer» est en plein essor et notre ville n'échappe pas à cette mode. Nos édificateurs sont de singulières personnalités : Charles Sarazin invente le concept d'Habitations à Bon Marché (HBM) pour lutter contre le logement insalubre, quant à Henri Sauvage il est le créateur de véritables œuvres d'art, dont la villa personnelle de Louis Majorelle, chantre de l'Art Nouveau. Henri Sauvage s'adaptera néanmoins étonnamment au style Art Deco, pourtant antithèse du style 1900. Ici, pour la Villa Natacha, ces architectes conjuguent une forme de simplicité et de raffinement dont la similarité stylistique la rapproche de ses deux contemporaines, la «Villa Arnaga» (1903-1906) à Cambo-les-Bains et la «Villa Saraleguinea» (1909) à Guéthary.

Les architectes de cette époque contribuent à un courant architectural auquel la façade fait des concessions au style basque, par petites touches, mais dont les intérieurs suivent les codes bourgeois et les courants artistiques parisiens.

Si les pierres de Bidache présentes en façade de la villa pourraient laisser à imaginer une certaine rusticité de style, l'intérieur, lui, donne libre cours à des artisans d'art qui sauront - grâce à des vitraux, des boiseries, des ferronneries et des carreaux de grès - donner une luxueuse empreinte d'Art Nouveau à l'ensemble.

Curiosité à relever : la maison du gardien, tout à l'entrée de la propriété, sera la première construite en 1905, puis suivront en 1907 la villa et les écuries.

La maison du gardien répond, en écho, à la même expression que la Villa, avec une simplification dans sa forme.

Puis, les circonstances de la vie amènent l'agent de change suisse Leuba à se défaire de sa Villa et, en 1924 Natacha Bralowski en devient l'heureuse propriétaire. Elle s'empresse, fort modestement, à la rebaptiser de son prénom - Natacha. Depuis lors, la Villa ne changera plus jamais de nom et peut-être est-ce un hommage naturel que l'on doit à cette femme qui n'aura de cesse d'entretenir avec passion cette bâtisse d'exception.

Hélas, en 1931 des revers de fortune poussent madame Bralowski à céder son bien à un certain Léon Saumon, dont la discrétion sera telle qu'à ce jour nous ne savons toujours rien de lui.

1939 verra le Vénézuélien Carlos Delfino Rodriguez et son épouse Josefa acquérir ce bien hors du commun. À leur tour, ils prodigueront à la Villa tout l'amour et l'attention qu'elle mérite : ce seront les particuliers qui l'habiteront le plus longtemps.

Tous ceux qui connaîtront Josefa Delfino pourront témoigner de son extrême générosité et de sa bienveillance envers tous. Très pieuse, faisant le bien partout où elle passe, elle fera don de sa propriété - villa et parc - à l'association Diocésaine de Bayonne laquelle la cède à la Ville de Biarritz en 1978.

Dans un premier temps la Ville de Biarritz y abritera les archives d'architecture de la côte basque. Puis, plus tard, s'y installent les bureaux des affaires culturelles de la ville, ainsi que les organisations des festivals importants.

Il est nécessaire de rappeler que la Ville de Biarritz ne compte que quatre sites «classés» aux Monuments Historiques : la chapelle Impériale (1981), le domaine de Françon (1999), l'église Orthodoxe (2016) et... la Villa Natacha (1995).

Le ministère de la Culture donne une définition précise de la différence entre l'«inscription» et le «classement» d'un bâtiment : «Il existe deux niveaux de protection au titre des monuments historiques : l'inscription et le classement. L'inscription constitue le premier niveau de protection, et le classement le niveau le plus élevé.» et rappellent que «Les monuments historiques, en raison de leur intérêt historique, artistique ou architectural, font l'objet de dispositions particulières pour leur conservation afin que toutes les interventions d'entretien, de réparation, de restauration ou de modification puissent être effectuées en maintenant l'intérêt culturel qui a justifié leur protection.».

La protection d'un bâtiment peut être partielle ou totale : dans le cas de la maison du gardien, les façades et les toitures sont inscrites aux Monuments Historiques depuis 1993.

La Villa Natacha connaît pour sa part, et depuis 1995, la plus haute protection nationale : le classement.

Si l'utilisation actuelle de la Villa est bien en-deçà de ses capacités d'exploitation, la seule mention de sa vente constitue un blasphème.

La toute proche Villa Sion est là, à nous scruter, avec un regard réprobateur qui semble nous dire «allez-vous, après moi, aussi l'abandonner ?».

Que lui répondez-vous ?

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