À BIARRITZ, L'ABSTRACTION DE L'ART, OU L'ART DE L'ABSTRACTION ?
Le dynamique maire de Bayonne offrira sous peu une nouvelle médiathèque, qui suivra l'achèvement de la rénovation-extension du Musée Bonnat-Helleu, après la création pas si lointaine du DIDAM sur les rives de l'Adour, et en complément du Musée Basque et de l'Histoire de Bayonne sur celles de la Nive. Bref, les Bayonnais amateurs d'art ont bien de la chance.
Nous, Biarrots, sommes mis en sevrage depuis l'arrivée de cette mandature. C'est tout simplement incroyable, et il ne nous reste que le souvenir des expositions de qualité dont nous ont gratifiés les deux précédents maires Borotra et Veunac.
À part deux événements dépourvus de rayonnement, soit une autre exposition dédiée au sculpteur biarrot Zigor, à quelques mois d'intervalle seulement de la précédente, et un accrochage des tableaux de la peintre locale Kardesch - proche de Madame Arosteguy dont le bureau municipal lui sert aussi de show-room -, ce fut le NÉANT, le VIDE, l'effacement complet de toutes formes d'art.
Voilà la conséquence d'une maire étrangère à ce qui, à notre avis, est une donnée essentielle à l'équilibre humain.
Pourtant, renier toute ambition culturelle c'est faire fi rôle de l'Art dans la transmission et l'universalité du patrimoine et dans le lien qu'il crée entre les époques et les personnes.
La contemplation d'une œuvre d'art c'est pourtant une expérience jubilatoire, une source d'émotions, de réflexion, voire de méditation et de transcendance. C'est un voyage dans l'irréel, une invitation au rêve, et parfois l'occasion de réveiller nos consciences lorsque l'art n'est pas seulement contemplatif mais aussi porteur de messages.
Alors quand nous voyons la mairesse biarrote se transporter chez nos voisins bayonnais pour se rendre à une preview du tout-nouveau Musée Bonnat-Helleu, c'est à se demander ce qu'elle est allée y faire ! Parader ? Se montrer, et si possible en pseudo-amatrice d'art ? Sans doute cela aura été pour elle l'occasion de nouer connaissance avec certaines œuvres de Léon Bonnat et de ses suivants et aura-t-elle eu recours à son GPS pour s'y rendre.
«Cynique», diraient certains, que de se prosterner dans un sanctuaire des beaux-arts quand, chez soi, on a tordu le cou à tant d'opportunités pour permettre, notamment à la jeune génération, de se familiariser avec différents courants artistiques. Les Villas «Sion» et «Fal» qui, l'une ou l'autre, aurait dû être convertie en un lieu d'expositions. Non, ces deux aubaines offertes sur un plateau ont été lamentablement bradées. Exit ces deux héritages légués par les maires «d'avant» !
Quel manque d'ambition pour Biarritz ! Quel manque de vision ! Quel manque d'élévation !
Niet aussi au don d'une sculpture monumentale de l'artiste internationalement connu Louis Derbré, qui fait aujourd'hui les délices des Angloys.
Niet encore à une exposition d'objets d'art populaire basque, initialement prévue entre les collectionneurs et la directrice de la médiathèque, contrainte depuis lors à rendre son tablier pour s'extraire du joug municipal et aller exercer sa mission de service public ailleurs. Voilà bien ici l'expression d'une volonté frénétique de ne pas mettre en valeur la culture basque, de la mépriser ?
Au sortir de sa visite bayonnaise incongrue, la maire de Biarritz croit nous rassurer en nous promettant «de belles perspectives de collaboration avec Biarritz pour développer notre politique culturelle déjà très dense». Mis à part les événements dits culturels assurés à Biarritz par des organisations privées - festivals et spectacles divers - les initiatives de la municipalité pour les arts plastiques sont inexistantes.
Aussi lorsqu'elle compte «développer [sa] politique culturelle», pense-t-elle à développer le néant ? N'est-ce pas l'art de l'abstraction ?