QUAND L'HEURE DU BILAN CULTUREL SONNE
«La politique culturelle de la ville se fera sans vous !»
Cette phrase, écrite par madame Arosteguy à Jakes Abeberry, pour lui signifier son renvoi de Biarritz Culture - dont il était le fondateur et le président -, représente la pire bassesse qui soit.
C'est une phrase qui transperce. Qui sidère. Que l'on fait répéter car elle ne peut être assimilée, ne peut être comprise.
Pourquoi cette humiliation publique faite à un homme dont les Biarrots - toutes tendances confondues - reconnaissent l'action bénéfique ?
Oh certes, cette dame en prononcera d'autres - de même acabit - en privé, en public, sur scène ou en conseil municipal. Sa vanité et son autoritarisme lui font croire à une toute puissance de sa parole et que la portée de ses propos sont tolérables et tolérés.
Elle pense qu'il est possible d'écarter de sa route une fraction de la population qu'elle estime gênante - personnes trop clairvoyantes, intelligentes, compétentes, sages, cultivées - pour s'entourer de quelques éparses laudateurs, permanents dans leur esprit moutonnier.
Mais ce n'est pas ça diriger une ville.
C'est parler à des personnes qui ne nous ressemblent pas, que nous pouvons ne pas apprécier et même détester.
C'est travailler au quotidien avec des personnes aux parcours différents, aux convictions différentes, aux sensibilités parfois contraires à celles que l'on porte.
Être maire, c'est aller au devant, en première ligne pour être au plus près des problèmes et des préoccupations des habitants, c'est prévenir avant que d'avoir à guérir.
Faire communauté, c'est cela.
Ce n'est pas faire des permanences de mairie à l'inscription limitée et obligatoire.
Ce n'est pas faire une campagne de communication «Le maire à votre écoute dans votre quartier» chaperonné - protégé ? - par les forces de l'ordre, un directeur et un chef de cabinet et trois adjoints.
Ce n'est pas faire des réunions de quartier avec un discours préparé à l'avance et emmener avec soi, tel un bouclier, sa majorité municipale.
Ce n'est pas non plus mener la politique de la terre brûlée parce que certaines personnalités - à la liberté d'opinion et d'expression - ne conviennent pas à un maire ou son conjoint.
Une mairie n'est ni une
chapelle, ni un QG de parti. Un maire doit être au service de tous,
capable d'œuvrer avec tous.
Mais alors, que devient la Culture à Biarritz sans Jakes Abeberry ?
À cette réponse, nous savons tous répondre : le néant.
Mélangeant tristement ce qui relève de l'événementiel et du culturel, la maire pédale dans la semoule pour essayer de gonfler les «réalisations». Mais lesquelles ?
Ce sujet Culture ne représente, pour madame Arosteguy, qu'une case de plus à cocher dans les attributions d'une ville. Ce n'est ni la priorité, ni la préoccupation d'une majorité trop occupée, depuis le premier jour de son élection, à communiquer pour sa réélection.
La suppression des grandes expositions d'Art au Bellevue, hormis l'accrochage de tableaux de deux peintres locaux dont le travail est régulièrement visible dans des commerces de la ville, montrent l'impéritie d'une maire et d'une adjointe à la Culture.
La fermeture de l'église Sainte-Eugénie entraînant, de facto, l'interdiction d'accès à sa Crypte, a montré l'invraisemblable incapacité de la maire et de son adjointe à la Culture de délocaliser immédiatement la tenue d'expositions en d'autres sites de la ville : Bellevue, Villa Sion, Casino Municipal, Villa Natacha, Halle d'Iraty, Villa Fal. À croire que cette mise en péril est une aubaine pour se soustraire à une ambition culturelle.
Parlons-en de la Villa Fal : la vente insensée de ce patrimoine exceptionnel portera le sceau d'une municipalité intellectuellement aux abois. Tout projet culturel était possible à envisager dans ce joyau architectural biarrot : au lieu de cela, des bureaux alignés viendront peupler un espace vide de sens, au mépris de son histoire passée.
Quant à la Villa Sion et la Villa Natacha, rattachées désormais par un même sort - la dilapidation du patrimoine - l'incompétence d'élus inadaptés à leur fonction aura fini d'achever ce pitoyable bilan culturel du mandat 2020-2026.
Et que dire du Festival des Arts de la Rue, inexplicablement rayé de la programmation municipale ? Art, s'il en est, les multiples expressions du Cirque étaient ici représentées, à la portée de tous. Ce voyage dans l'onirisme, où des artistes faisaient chaque année preuve d'un peu plus de créativité, manque aux Amateurs du Beau.
L'affaire du déshonorant refus - par madame Arosteguy et son adjointe à la Culture madame Pinatel - du don d'une sculpture d'un artiste reconnu à l'international, Louis Derbré, nous fera la risée du monde culturel régional. Souvenons-nous de cette fin de non-recevoir avec des arguments affligeants et grossiers envers la donataire et irrespectueux envers l'artiste. L'œuvre «refusée» est dorénavant visible chez nos voisins angloys, dont le conseil municipal aura voté à l'unanimité l'acceptation du don. En attendant, des œuvres monumentales de Louis Derbré sont présentées dans des lieux prestigieux du monde entier, et un Musée de plein air est dédié à l'artiste dans le Loir-et-Cher.
Face au départ désormais acté, en 2026, du talentueux danseur et chorégraphe Thierry Malandain et de ses Ballets éponymes, et aux bâtons dans les roues mis dans le chemin de sa compagnie, les successeurs de madame Arosteguy devront se battre férocement pour maintenir le label d'exception du Centre Chorégraphique National (CCN) à Biarritz, tandis que nos voisins bayonnais se verraient bien prendre la relève. De cette prolongation dépend aussi le maintien du Festival «Le Temps d'Aimer», intimement lié aux Ballets Malandain.
Jakes Abeberry, à l'initiative de la venue à Biarritz des Ballets Malandain et compétent dans plusieurs expressions et disciplines - la danse, le chant, l'écriture -, saura être un passeur de Culture d'où qu'elle vienne, sans œillères.
Fervent défenseur de l'Euskara, il n'aura de cesse de permettre son apprentissage, encourager son usage et promouvoir sa vulgarisation en tous lieux.
L'amour de la langue basque, mais pas seulement : la construction de la médiathèque, vecteur de connaissances et de savoir, est un cadeau offert à tous ceux qui veulent élargir leurs horizons.
Ce mandat verra l'annulation - par le seul caprice de la maire - d'une exposition d'objets populaires basques : mais est-ce si surprenant d'une femme qui ignore la Culture basque ?
Puis, le départ forcé de la biarrote Maialen Sanchez, infatigable directrice des lieux qui aura subi pressions, humiliations et camouflets à répétition, gravera l'empreinte matérielle d'une maire en conflit avec tant et tant de ses agents communaux.
La capacité de Jakes Abeberry à se dépasser et à permettre qu'une ville balnéaire rivalise avec de grandes métropoles, c'est la conjugaison de l'amour d'un homme pour sa ville, de l'intelligence, de la vision d'avenir, d'un immense travail de l'ombre, du savoir-faire et de la compétence.
Alors non madame Arosteguy, la politique culturelle ne se fait pas sans Jakes Abeberry : avec vous et les vôtres, elle ne se fait plus.
Alors, madame Arosteguy, la politique culturelle biarrote se fera, dès l'an prochain, sans vous et les vôtres.
En souvenir de Jakes - ou Jacky, comme l'appelait Didier Borotra et tant d'autres - et de ce que nous lui devons, nous invitons les Biarrots à rendre sa fierté à notre ville et faire qu'elle redevienne le phare culturel qu'elle fut auparavant.
Ce moment, où le citoyen prend en main un bulletin de vote, est celui où l'avenir change.
L'avenir dépend de vous, de nous, de toi, de moi.
À nous tous - au respect de ceux qui ont œuvré pour la Culture à Biarritz - de nous en montrer digne le moment venu.