REGARDEZ COMME LES GENS SONT MÉCHANTS !

Après une journée de travail bien remplie avec mes camarades, sur le chemin de retour en mon humble demeure je me suis laissé tenter par la terrasse d'un café de la ville, inondée d'un soleil que je croyais disparu à jamais, histoire aussi d'y sécher mes os mouillés par une trop longue période de pluie à laquelle nous n'étions plus habitués.

Confortablement installé, tout en sirotant ma grenadine, je me suis alors plu à observer les promeneurs et aussi quelques passants qui, d'un pas alerte, regagnaient sans doute leur pénates.

Quand tout à coup, une tablée de cinq joyeux drilles (rien à voir avec André, l'ancien boxeur biarrot) est venue interrompre ma contemplation empreinte de rêverie par leur voix haute, aux accents bien de chez nous. Chacun s'accordait à dire que sa ville n'avait rien à envier à la nôtre qui, d'ailleurs, était en train de se dégrader à vue d'œil car notre cité impériale était devenue une belle endormie rabougrie, sclérosée. J'en conclus donc en moi-même qu'ils étaient probablement venus à Biarritz pour se retrouver en terrain neutre car il était patent qu'aucun n'était Biarrot.

Un peu agacé à les entendre, après un échange de regard furtif je me suis autorisé à m'immiscer dans leur conversation qui avait touché mon amour propre de Biarrot. C'est alors que mes gaillards se mirent à tour de rôle à ergoter.

D'abord un Bayonnais, qui se flattait que chez lui un nouveau musée Bonnat à la surface doublée était en cours de réalisation, après qu'un stade tout beau, tout grand, tout neuf à vu le jour.

Puis vint le tour de l'Angloy qui, lui, allait se flatter d'un nouveau Centre d'Art Contemporain, du projet d'agrandissement de la médiathèque avec une enveloppe de dix millions d'euros, en attendant celui d'une piscine olympique.

Le troisième, un Bidartar, d'enchérir avec l'ancien cinéma «Beheria» qui fait l'objet d'une réhabilitation et d'une extension en salle de spectacle.

Le quatrième compère, qui s'avéra être luzien, s'enorgueillit du tout récent Centre culturel Peyuco Duhart et de la nouvelle piscine municipale inaugurée en fin d'année dernière, sans oublier l'Îlot Foch et son parking souterrain ouvert voilà peu.

Comme un clou enfoncé dans mon coeur de Biarrot chauvin, le cinquième, un Ziburutar, heureusement le dernier de cette joyeuse compagnie car je crois m'étouffer, invoque alors le Centre d'Interprétation de l'Architecture et du Patrimoine (CIAP), plus de 1000 mètres carrés sortis de terre après deux ans de travaux aux Récollets.

Il me fallait donc tenir tête à ces provocateurs. J'ai cru judicieux de parler de la récente rénovation de l'École Victor-Duruy, mais mes contradicteurs m'ont vite recadré en me rappelant que ça c'était de l'histoire ancienne, avec pour preuve que c'était la précédente mandature de Michel Veunac qui avait réalisé le projet. Balbutiant d'humiliation, je tenais à les convaincre à tout prix que chez nous aussi les choses bougeaient, car on a quand même vendu l'Auberge de Jeunesse, la Villa Fal, et on va bientôt vendre le bâtiment du Centre Communal d'Action Sociale (CCAS). Mais ils n'ont pas été convaincus.

Ah, mais non, tu ne peux pas en rester là, me dis-je ! Fouillant alors vite au tréfonds de ma mémoire, eurêka !, j'ai enfin trouvé une réalisation biarrote, et d'importance au point que cela a donné lieu à une inauguration en grande pompe, la maire ayant même sorti pour l'occasion le ruban à couper tricolore.

La cérémonie d'inauguration

Avec ça, je vais leur en boucher un coin.

Content de moi, je brandis cette réalisation d'envergure que nul ne pourrait venir contester, avec en prime une photo immortalisant l'événement, vite récupérée grâce à mon téléphone portable : le nouveau terre-plein devant l'entrée du golf du Phare, avenue Édith-Cavell.

Le terre-plein en question !

Ils se sont alors levés ex abrupto, en riant à gorge déployée un rien narquois. Je n'ai pas compris pourquoi... Regardez comme les gens sont méchants !

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